«Le Français vainqueur de
l'Espagnol redouté». Gravure de Jacques Lagniet. Paris,
Bibliothèque Nationale, département des estampes.
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LE FRANÇOIS
Senor d'où te vient ce caprice / Tout ne respond pas à
tes voeux /
Mais pour moucher ton nez morveux / Ce mouchoir est à
ton service
L'ESPAGNOL
J'apportois des mors et des brides / Pour dompter du
François l'effort / Mais je vois bien qu'il est trop
fort / Et que nous sommes trop timides.
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Sur
cette gravure satirique, on voit le Français (à droite)
administrer une correction à l'Espagnol «morveux». Le
Royaume d'Espagne, force dominante en Europe, s'était
opposé militairement à la France au début du XVIIe
siècle, dans le cadre plus large de la Guerre de Trente
Ans.
Sortis vainqueurs de l'affrontement
contre toute attente (victoire de Rocroi en 1643), les
Français se virent en mesure de succéder à leurs voisins
dans le rôle de phare culturel aussi bien que dans celui
de première puissance économique et militaire.
Mais dans le premier tiers
du siècle, l'influence espagnole restait forte dans les
arts, dans la mode, dans la littérature: en 1637,
Corneille obtint ainsi son premier grand succès en
adaptant l'histoire du Cid Campéador, héros de la reconquista
ibérique. Pendant tout le XVIIe siècle, et
même encore au début du XVIIIe (Lesage) on
adapta en français des romans et des nouvelles
espagnols, mais surtout de comedias de Lope de
Vega, Calderon, Cervantes, Tirso de Molina et autres
dramaturges du Siècle d'Or.
Le mariage du jeune Louis
XIV à l'Infante Marie-Thérèse en 1660 à la fois scelle
la paix entre les deux anciens ennemis et marque
symboliquement le déplacement du centre de pouvoir en
Europe. Grâce à un contrat habilement négocié par
Mazarin, la France obtient même le droit de succession à
la couronne d'Espagne en cas de non-paiement d'une dot
exhorbitante. Louis XIV n'hésitera pas à faire valoir ce
droit au bénéfice de son petit-fils, et obtiendra gain
de cause en 1714 au terme d'une des nombreuses guerres
qu'il a menées pour affirmer la prééminence française en
Europe. [voir la carte].
L'actuel roi d'Espagne Felipe de Borbón descend donc du
roi-soleil.
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